Située dans le complexe industriel et de recherche de Sophia-Antipolis à Valbonne dans les Alpes-Maritimes (mini Silicon Valley français), la société Exelvision emploie 27 personnes. La moyenne d'âge est de 26 ans, on est jeune dans cette boîte, et surtout plein d'idées.
PREMIER CONTACT:
Mega sympathique. On peut y rencontrer tout le personnel qui se fait un plaisir de vous montrer ses dernières trouvailles et il y en a beaucoup. lacques Palpacuer, ancien ingénieur de Texas Instruments France, est dans son bureau, personne très occupée mais qui prend le temps d'écouter ses collaborateurs et les visiteurs. Le contact est facile. On croit rêver : le directeur laisse la porte grande ouverte pour toute personne de son entreprise. Ici, tout le monde se tutoie, et l'ambiance est bonne, très bonne, on travaille d'arrache-pied à construire l'ordinateur de demain.
- Jacques Palpacuer, comment vous est venue l'idée de construire un ordinateur personnel dans le contexte actuel ?
J. P. : Nous avons essayé à Texas Instruments de faire un produit qui nous semblait le mieux adapté au marché. Malgré tous nos efforts, nous n'y -sommes jamais arrivés vu la structure de Texas Instruments, C'est pour cette 1ère raison. La deuxième raison est que l'on est soit chef d'entreprise, soit employé, aussi le désir nous a poussés à créer une entreprise. Tout cela ne s'est pas passé sans difficultés. Une fois le prototype réalisé, nous avons essayé de trouver des organismes de financement, nous en avons vu des dizaines qui n'ont pas voulu miser de l'argent sur le produit. L'investissement était très important, Cela se passait il y deux ans. Donc, après 24 mois de démarche, le ministère de l'industrie nous a proposé la CGCT qui cherchait des partenaires pour diversifier ses activités. Après de nombreuses négociations, nous avons signé avec la CGCT. L'idée était d'utiliser les capacités de la CGCT pour la production, le montage, les tests, la conception des produits et le marketing se faisant à Valbonne. Le groupe CGCT est un groupe puissant qui emploie plus de 8.000 personnes. Exelvision est une filiale de ce groupe nationalisé. Je dois dire que les rapports sont excellents entre la CGCT et Exelvision.
- Jacques Palpacuer, comment voyez-vous l'avenir d'Exelvision ?
J.P. : L'industrie de l'informatique personnelle est une industrie qui bouge beaucoup, c'est pour cela que nous devons rester vigilants. Nous désirons conserver notre structure. En effet, seule une structure comme la nôtre qui emploie peu de personnes est capable de s'adapter à toutes les demandes des consommateurs. De plus, Exelvision est une société de conception et surtout de marketing, et ceci nous pousse à écouter le consommateur. La manière dont Exelvision est organisé : une équipe d'ingénieurs et une équipe de Marketing, la partie fabrication étant sous-traitée à des spécialistes, ceci nous place près du marché. Bien que nous soyions une société qui évolue dans ce que l'on appelle la haute technologie, Exelvision est avant tout une société de Marketing. De nombreuses sociétés de notre type en Europe ont du ma( à percevoir le besoin du consommateur. Le concept de faire un produit pour le marché n'existe pas encore. Dans ce contexte, nous avons essayé dans notre premier produit d'appliquer de manière très simple ce que les consommateurs, les utilisateurs d'ordinateurs désiraient. Simple, modulaire, puissant, d'un prix accessible à tous, voilà notre démarche. Un système complet à moins de 10000 francs TTC : unité centrale, imprimante, moniteur, unité de disquettes, modem. Il y aura de nouveaux produits. Mais nous n'avons pas conçu EXL 100 pour qu'il dure 6 mois. Le concept de ce système est tel qu'il pourra être utilisé pendant de nombreuses années. Il est hors de question que des personnes qui ont investi dans notre système se retrouvent dans quelques temps sans périphérique ni logiciels. Dans ce sens, nous aurons beaucoup plus la démarche de Apple, c'est-à-dire de gens qui pensent qu'une machine doit durer plusieurs années.
- De mauvaises langues prétendent que Exelvision n'a pas d'avenir vu le choix des microprocesseurs. Beaucoup de gens se plaignent du manque de logiciels
J. P. : Le problème des logiciels s'est posé dans les premiers mois de la commercialisation ; cela est normal : les sociétés de logiciels ne connaissaient pas notre système, Depuis lors, de nombreuses sociétés de logiciels sont vivement intéressées par le système et ces mêmes sociétés travaillent sur des logiciels. Toutes les semaines, nous recevons une dizaine de nouveaux programmes. Tous ne seront pas commercialisés, seulement les meilleurs. D'autre part, nous avons investi énormément dans le logiciel, ainsi nos programmeurs travaillent sur de nouveaux logiciels de très haute qualité. De plus, nous avons engagé une équipe de 20 programmeurs qui traduisent les meilleurs logiciels pour le système EXL 100. Le fait qu'Exelvision va équiper l'Education nationale nous pousse à développer des logiciels éducatifs ou didacticiels de haut niveau. Il ne faut pas oublier que les possesseurs d'IBM PC ou d'Apple ont attendu de nombreuses années avant d'avoir une bibliothèque de logiciels conséquente. Aujourd'hui, notre système est largement diffusé : nous atteignons les 20.000 utilisateurs, après seulement trois mois de commercialisation. Le nombre de logiciels va donc augmenter de façon très significative. Tous les problèmes de logiciels sont en voie de se résoudre. je pense que d'ici la fin de cette année, nous aurons à notre disposition 500 logiciels sous toutes les formes.
- Quelles sont les ambitions dExelvision ?
J. P. : Pour Exelvision, l'année 1985 est 'une année très importante. Nous avons à faire face à plusieurs problèmes : l'arrivée sur le marché de grands constructeurs : Philips, les japonais, la percée de Sinclair en France et, la conjoncture. Le produit arrive maintenant à maturité. Les gens peuvent découvrir un système très puissant. Le fait que notre matériel soit retenu par l'Education nationale après seulement quatre mois d'existence est très encourageant. Je pense que nous allons participer à "l'informatique pour tous". Pour les années à venir, notre objectif est de tenir une place prépondérante sur le marché français, et dans une autre mesure sur le marché export. Nous avons dans nos cartons d'autres machines et pas mal d'idées, mais ne faisons pas de prédictions...
- Pour en revenir aux microprocesseurs, le choix a-t-il été judicieux ?
J. P. : Toutes les discussions au sujet du choix des microprocesseurs sont des querelles d'école. Ce qui a motivé le choix de ce microprocesseur est parfaitement justifiable. Il ne faut pas avoir uniquement une vision informaticienne quand on construit une machine grand public, Le TMS7000 va être un processeur massivement distribué. Certains grands constructeurs, d'automobile vont équiper les tableaux de bord de leurs véhicules avec des TMS7000. De grandes quantités d'appareils vont aussi être équipés de TMS7000. Ceci aura pour effet de baisser le prix de ce microprocesseur.
Exelement Vôtre N°1 © Avril 1985
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